AVE MARIA
Qui ne connaît ces deux mots ?
Qui ne connaît, les mélodies sur lesquelles ils se chantent, celles, entre autres, de Schubert ou de Gounod, cette dernière étant sans doute la plus populaire? Qui n'a pris plaisir, un jour ou l'autre, à l'entendre chanter par l'un des innombrables artistes qui l'ont interprétée, de Tino Rossi à Andrea Bocelli, pour n'en citer que deux parmi les plus médiatiques?
Si l'on faisait le compte de tous ces interprètes, de leurs enregistrements et du nombre de disques vendus pour chacun d'eux et encore - calcul impossible - du nombre de fois que chaque disque a été posé sur la platine, on obtiendrait un chiffre énorme équivalant à un très grand nombre de rosaires.
Car c'est évidemment là qu'on veut en venir,en ce mois de mai dit « mois de Marie ". Le rosaire est une prière composée de 200 « Je vous salue, Marie" (c'était 150 jusqu'à ces derniers temps; c'est 200 désormais). Certains s'esclafferont, peut-être: « Comment peut-on répéter deux cents fois la même chose? Quant au rapprochement avec les Ave Maria chantés, il ne tient pas. D'abord, ils ne sont pas chantés deux cents fois à la suite, et puis la musique leur confère un charme spécial que n'a pas la récitation plus ou moins machinale! "
Que répondre à cela? Ceci :
Le rosaire est une prière. La prière est un dialogue avec Dieu, une tentative de réponse à son amour pour nous. Toute prière est donc un acte d'amour et l'amour n'a-t-il pas qu'un seul mot? Et c'est cet amour qui vivifie la récitation, aussi bien et mieux même que ne saurait le faire la plus suave mélodie.
Mais il y a quelqu'un qui peut parler de ces choses mieux que nous. Et ce quelqu'un, c'est tout simplement Jean-Paul II.
En effet, tout poète, philosophe, théologien - et même pape! - qu'il soit, Jean-Paul II s'intéresse au rosaire. Il y attache une telle importance qu'il y a consacré, en octobre dernier, une lettre apostolique de 60 pages, qui, d'ailleurs fait écho à des documents similaires publiés par de précédents papes tels que Léon XIII, Jean XXII et Paul VI :
« Depuis mes plus jeunes années) écrit Jean-Paul II, cette prière a eu une place importante dans ma vie spirituelle. Mon récent voyage en Pologne me l'a rappelé avec force,et surtout la visite au sanctuaire de Kalwaria. Le Rosaire m'a accompagné dans les temps de joie et dans les temps d'épreuve. Je lui ai confié de nombreuses préoccupations. En lui j'ai toujours trouvé le réconfort. Il y a vingt-quatre ans, le 29 octobre 1978 deux semaines à peine après mon élection au siège de Pierre, laissant entrevoir quelque chose de mon âme, je m'exprimais ainsi: « Le Rosaire est ma prière préférée. C'est une prière merveilleuse. Merveilleuse de simplicité et de profondeur [...] On peut dire que le Rosaire est, d'une certaine manière, une prière-commentaire du dernier chapitre de la Constitution Lumen gentium du deuxième Concile du Vatican, chapitre qui traite de l'admirable présence de la Mère de Dieu dans le mystère du Christ et de l'Église. En effet, sur l'arrière-fond des Ave Maria défilent les principaux épisodes de la vie de Jésus Christ. Réunis en mystères joyeux, douloureux et glorieux ils nous mettent en communion vivante avec Jésus à travers le coeur de sa Mère, pourrions-nous dire.
Aux mystères joyeux, douloureux et glorieux auxquels il est fait allusion, ci-dessus, Jean-Paul II a suggéré d'ajouter des « mystères lumineux ", relatifs aux évènements de la vie publique de Jésus, et c'est pourquoi le nombre de «Je vous salue, Marie" qui composent le Rosaire est passé de 150 à 200. Un peu plus loin dans sa lettre, Jean-Paul II explique en quoi consiste cette prière:
« C'est précisément à partir de l'expérience de Marie que le Rosaire est une prière nettement contemplative. Privé de cette dimension, il en serait dénaturé, comme le soulignait Paul VI : 'Sans la contemplation' le Rosaire est un corps sans âme et sa récitation court le danger de devenir une répétition mécanique de formules, et d'agir à l'encontre de l'avertissement de Jésus . Quand vous priez, ne rabâchez pas comme les païens; ils s'imaginent qu'en parlant beaucoup ils se feront mieux écouter Mt _7). Par nature, la récitation du Rosaire exige que le rythme soit calme et que l'on prenne son temps, afin que la personne qui s'y livre puisse mieux méditer les mystères de la vie du Seigneur, vus à travers le cour de Celle qui fut la plus proche du Seigneur; et qu'ainsi s'en dégagent les insondables richesses.' »
Veuillez nous permettre une dernière citation:
« À la lumière d'une bonne compréhension de l'Ave Maria, on perçoit avec clarté que le caractère marial, non seulement ne s'oppose pas au caractère christologique, mais au contraire le souligne et le met en relief. En effet, la première partie de l'Ave Maria, tirée des paroles adressées à Marie par l'ange Gabriel et par sainte Élisabeth, est une contemplation d'adoration du mystère qui s'accomplit dans la Vierge de Nazareth.
Ces paroles expriment,pour ainsi dire, l'admiration du ciel et de la terre, et font, en un sens, affleurer l'émerveillement de Dieu contemplant son chef-d'oeuvre : l'incarnation du Fils dans le sein virginal de Marie, dans la ligne du regard joyeux de la Genèse (cf Gn 1, 31), de l'originel « pathos » avec lequel Dieu, à l'aube de la création, a regardé l'oeuvre de ses mains. » Dans le Rosaire, le caractère répétitif de l'Ave Maria nous fait participer à l'enchantement de Dieu : c'est la jubilation, l'étonnement, la reconnaissance du plus grand miracle de l'histoire. Il s'agit de l'accomplissement de la prophétie de Marie.. « Désormais tous les âges me diront bienheureuse(Lc 1)48) »
La prière du Rosaire peut se faire en privé. Elle peut se faire aussi en communauté. C'est ce qui se passe dans la paroisse, chaque lundi à 15 h, dans la crypte de Notre-Dame. Nous y récitons, non pas le Rosaire en entier, mais un seul chapelet. L'ensemble du Rosaire se trouve ainsi réparti sur quatre lundis. Les participants, il est vrai, sont peu nombreux. Pourquoi, ne viendriez-vous pas renforcer ce petit groupe?
Bernard Benedetti.